Import-export

Comme chaque fois que le conflit israélo-palestinien s’est trouvé réactivé sur place, et c’est le cas actuellement, la crainte est forte de voir ces affrontements s’importer en France, que ce soit dans les banlieues ou dans les beaux quartiers. Cette nouvelle guerre ouverte déclenchée dans la bande de Gaza à l’initiative du Hamas en est une illustration, avec une particularité qui serait que les querelles franco-françaises semblent s’être invitées dans un débat déjà suffisamment compliqué. Il n’y avait pas moins de trois manifestations à Paris le week-end dernier qui rassemblaient les soutiens à Israël, ceux qui plaidaient pour les Palestiniens, et ceux qui récusaient toute forme de drapeau, réclamant uniquement un cessez-le-feu général.

Vous aurez deviné que ce sont ces derniers qui attiraient le plus ma sympathie, mais aussi qu’ils étaient les moins nombreux, tant les passions sont exacerbées entre les camps qui s’affrontent. Il y a une escalade verbale dans la dénonciation des agressions dont sont victimes les populations de chaque côté qui empêche les parties de se parler. Chacun tire argument des violences qu’il subit comme si cela pouvait justifier les excès commis de son côté. La passe d’armes entre la présidente de l’Assemblée nationale et le leader de la France insoumise en est une illustration. Yael Braun-Pivet ayant pris position en faveur d’Israël, et surtout ayant défendu le droit inconditionnel de l’état hébreu de se défendre par tous les moyens, s’est attirée les critiques de Jean-Luc Mélenchon, avec toute la nuance dont il peut faire preuve, l’accusant « d’encourager le massacre » à Gaza en « campant » à Tel-Aviv. Oh ! malheureux ! si pour vous et moi le mot camper évoque le camping, pour Mélenchon il ne pourrait être qu’une allusion à peine déguisée aux fameux camps d’extermination des nazis, naturellement.

Pour le pouvoir macroniste, l’occasion est trop belle de discréditer l’opposition de gauche au travers d’un de ses leaders, en profitant d’une ambigüité réelle de la position de LFI qui a refusé de qualifier le Hamas d’organisation terroriste, à part quelques exceptions comme François Ruffin. L’autre bénéfice attendu de cette polémique étant d’accélérer la dissolution espérée de la NUPES dont l’ex-majorité proclame la disparition depuis le jour de sa création, suivie par une partie de la presse d’opinion. À force de la prédire, cette prophétie va bien finir par se réaliser, au grand soulagement des amis de Yael Braun-Pivet, toujours aussi Playmobils, quoique beaucoup moins nombreux. Pendant que l’Assemblée qu’elle préside se contente une fois de plus d’être une chambre d’enregistrement où les budgets se succèdent en rangs serrés à grands coups de 49,3, l’opinion publique se déporte vers le Proche-Orient et les enjeux de politique française sont remis aux calendes.