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Quand Sandouville tousse
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 13 mai 2020 10:51
- Écrit par Claude Séné
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Je faisais allusion hier à la prise de position contestable de Bruno Le Maire qui donnait son avis sur l’interruption de la reprise de l’usine Renault à Sandouville. Comme simple citoyen, et à plus forte raison en tant que ministre de l’Économie, il devrait s’abstenir de critiquer une décision de justice, au prétexte qu’elle ne lui convient pas. Je trouve d’ailleurs étonnant, pour ne pas dire plus, que le gouvernement accuse la CGT locale d’avoir fait fermer l’usine, alors qu’un tribunal indépendant a statué et que nous verrons bien si la décision est confirmée ou non en appel.
Les politiques ont coutume de répéter qu’ils font confiance à la justice de leur pays, mais cela ne semble pas être le cas du ministre. Sur le fond, le conflit porte sur les règles sanitaires en vigueur dans l’entreprise et qui ne permettraient pas d’assurer correctement la santé et la sécurité des travailleurs. Le fait que certains syndicats soient favorables à une reprise rapide, et qu’une grande partie des employés soient du même avis, ne peut pas justifier la décision de la direction. La justice est précisément là pour arbitrer les conflits et l’on ne peut pas reprocher à quiconque de lancer l’alerte. Il ne faut surtout pas en faire un enjeu sur fond de guéguerre syndicale, comme le fait Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, qui n’en rate pas une pour se rallier au pouvoir, malgré ses rebuffades successives.
Car c’est toujours l’état qui contrôle l’entreprise Renault, et le groupe qu’elle forme avec Nissan et Mitsubishi, même si l’on est bien loin de l’ancienne Régie nationale des usines Renault, quand l’entreprise familiale avait été nationalisée à la sortie de la Deuxième Guerre mondiale. Pendant de longues années, la RNUR était le fleuron de l’industrie française et un laboratoire social où les ouvriers bénéficiaient de meilleures conditions de travail et de rémunération que dans les autres usines du pays. Le syndicalisme y avait trouvé son bastion, sa forteresse, au point qu’un Maurice Bokanowski disait : « quand Billancourt éternue, la France s’enrhume », car l’usine servait de thermomètre pour mesurer le climat social du pays. De nos jours, l’entreprise ayant été privatisée, elle n’est plus aussi symbolique, mais elle reste un exemple. On comprendrait mal que sous prétexte de relocalisation sur le sol français des activités externalisées dans des pays moins exigeants sur les normes sanitaires et sociales, on favorise un alignement par le bas des conditions de travail. Oui, l’activité industrielle doit reprendre dès que possible, dans l’intérêt de tout le monde, mais pas au détriment des salariés ni en faisant courir des risques à l’ensemble de la population. Renault vaut bien une messe, et il vaut mieux prendre les précautions au préalable que de pleurer ensuite sur le lait renversé.
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