Calendrier

Le premier avril n’est pas seulement le jour des canulars d’un goût parfois douteux, ou des nouvelles hénaurmes dont on ne perçoit pas toujours le caractère invraisemblable au premier coup d’œil. Cette année, il tombe dans un contexte particulièrement difficile et l’on imagine mal de plaisanter avec le danger mortel que représente le coronavirus. Si l’on nous avait dit, ne serait-ce qu’il y a quelques semaines, que le prix de l’essence allait chuter fortement, nous aurions pensé immédiatement à un poisson d’avril. Et c’est pourtant rigoureusement exact. Le revers de la médaille, c’est que la plupart des intéressés ne peuvent pas rouler en ce moment.

L’épidémie du covid-19 aura nécessairement de nombreuses conséquences sur le calendrier des prochains mois. Dès à présent, deux réformes « indispensables », celles des aides au logement et des indemnités de chômage, qui devaient entrer en vigueur aujourd’hui, sont reportées. La raison la plus évidente c’est de ne pas braquer encore plus de Français contre un gouvernement jugé sévèrement pour une forme d’impéritie et de manque d’anticipation dans la crise actuelle. D’ailleurs les mesures « consolatrices », comme la baisse du tarif réglementé du gaz ou les chèques énergie destinés aux familles les plus précaires et à ceux qui réalisent des travaux d’isolation, sont maintenues dans les délais prévus et la trêve hivernale des expulsions locatives est prolongée de deux mois. Toujours dans le registre compassionnel, la plupart des prestations sociales seront revalorisées comme annoncé, ce qui est toutefois inférieur à l’inflation.

Mais c’est surtout le calendrier législatif qui va être bouleversé. Le parlement ne siège que pour statuer sur les urgences sanitaires et le Conseil constitutionnel s’est mis au repos forcé. Pour ceux qui l’auraient oublié, il y avait une réforme sur le feu, et pas n’importe laquelle : LA réforme des retraites pour les 30 ans à venir, au bas mot. Adoptée en première lecture à l’Assemblée, elle devait poursuivre son parcours du combattant contre vents et marées et malgré l’opposition d’une majorité de Français pour être appliquée « quoi qu’il en coûte » au 1er janvier 2021. Selon les experts, les travaux ne sont pas près de reprendre, et le gouvernement n’aura sans doute pas les moyens, après le déficit immense engendré par la crise économique liée à l’épidémie, de financer un projet somme toute moins urgent que la reconstruction nationale. Au chapitre des paradoxes, on notera avec intérêt que ce pouvoir libéral se dit prêt à nationaliser des entreprises qui menaceraient de s’écrouler, lui qui avait constaté avec une satisfaction révoltante que la pétition sur le référendum d’initiative partagée s’opposant à la privatisation d’ADP et de la Française des Jeux, n’avait pas franchi la barre fatidique des 4,7 millions de signataires sur Internet.