![](/images/breton_assis.png)
Un triomphe de la démocratie
- Détails
- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 18 novembre 2019 10:42
- Écrit par Claude Séné
![](/images/breton_assis.png)
On l’a échappé belle ! Figurez-vous que nous avons failli subventionner Total pendant 6 ans de plus, jusqu’en 2026, en lui octroyant généreusement 70 à 80 millions d’Euros de déduction fiscale sur la production de biocarburant à base d’huile de palme, connue pour provoquer la déforestation massive des zones concernées par sa culture. Chapeau bas aux lobbyistes du groupe pétrolier pour leur travail souterrain diablement efficace, mais cas d’école exemplaire pour observer le fonctionnement de notre démocratie parlementaire.
Petit rappel des faits. Jeudi dernier, dans la soirée, l’Assemblée nationale ronronne paisiblement sur l’examen du projet de la loi de Finances 2020 quand quelques députés de la majorité déposent en catimini un amendement en faveur du maintien de l’huile de palme dans la liste des biocarburants qui bénéficient d’avantages fiscaux. Le texte, noyé dans la masse et soutenu par le gouvernement est adopté sans débat ni discussion. Le lendemain, branle-bas de combat écologiste, tollé, scandale, même Édouard Philippe s’alarme de la fronde possible, et réclame une nouvelle délibération. Et là, tenez-vous bien, l’amendement est repoussé à « une écrasante majorité », un score sans appel de… 58 à 2 ! Ce qui représenterait l’avis de la représentation nationale, réduite à peau de chagrin puisque selon certaines indiscrétions il y aurait 577 députés en état de marche. On constate donc qu’il suffit de rameuter une poignée d’élus pour faire passer une disposition à la faveur de la fatigue liée à de longues séances souvent tardives.
À quoi cela rime-t-il donc de procéder à des pantomimes le jour des questions au gouvernement, au cours de séances où les rangs sont mieux garnis par la grâce des caméras de télévision ? La plupart des textes présentés sont adoptés, avec ou sans discussion, dès l’instant où ils sont soutenus par le gouvernement. Je sais bien que les députés, à quelques exceptions près, siègent en commission quand ils ne sont pas présents dans l’hémicycle, ce ne sont pas eux les responsables d’un tel état de fait, mais il est clair que le fonctionnement et le principe même de la démocratie représentative sur le modèle obsolète que nous connaissons sont totalement à bout de souffle. L’équilibre des pouvoirs n’est plus qu’un mythe, le pouvoir exécutif ayant pris toute la place depuis la personnalisation et la présidentialisation du régime de la 5e république. Au passage, on peut aussi noter la faiblesse des convictions écologiques du gouvernement, converti de fraîche date en surface, mais qui varie selon les vents dominants, capable de soutenir des positions inversées en l’espace de 24 heures par pur opportunisme. On observe également le peu de cas du vote parlementaire, que l’on fera recommencer à sa guise jusqu’à ce qu’il soit conforme à ses souhaits. Comment les citoyens pourraient-ils avoir confiance dans ceux qui sont supposés défendre leurs intérêts et la justice ?