Brexit or not brexit?

Telle est (encore) la question. Plus de 3 ans après le vote historique du 23 juin 2016 qui a vu la victoire surprise des partisans du départ de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, les Britanniques ne sont toujours pas parvenus à un accord sur les modalités de la séparation, ni même, pour une fraction non négligeable d’entre eux, sur son principe. Il est vrai qu’un scrutin aussi notoirement biaisé par une campagne électorale mensongère, à la limite du processus démocratique, peut largement être contesté. Les partisans du « remain » ont le droit de se sentir floués, mais il est un peu tard pour revenir en arrière.

Un commentateur plus expert que je ne le suis résumait la situation en observant que lorsque la Grande-Bretagne faisait partie intégrante de l’UE, elle avait déjà un pied dans l’Union et un pied dehors, et que maintenant son objectif était de faire l’inverse : mettre un pied dehors tout en gardant un pied à l’intérieur. Les partisans du Brexit, et ils sont restés nombreux en dépit des aléas et des vicissitudes de ces derniers mois, restent persuadés qu’ils peuvent conserver tous les avantages de l’union douanière, de la libre circulation des biens et des personnes, etc. tout en ne déliant pas leur bourse, et même en faisant du bénéfice sur la contribution qu’ils sont supposés fournir en contrepartie des services obtenus. La fameuse phrase de Margaret Thatcher « i wont my money back », illustre parfaitement cette attitude. Des politiciens peu scrupuleux comme Nigel Farage ont menti éhontément aux électeurs en leur faisant miroiter des avancées sociales mirifiques grâce aux contributions européennes récupérées. L’argent ainsi épargné a été dépensé cent fois, pour reconnaitre finalement que la balance serait sans doute négative.

Boris Johnson va peut-être néanmoins réussir son pari, là où Teresa May a échoué, en partie grâce à un talent manœuvrier indéniable, mais aussi par la lassitude des protagonistes. Le grand public en Angleterre en a plus qu’assez de ce feuilleton interminable et serait prêt à n’importe quelle solution du moment qu’elle soit immédiate et effective. Les députés, après avoir bien fait sentir au Premier ministre qu’ils restaient maîtres du jeu, pourraient finalement adopter cet accord qui leur permettrait de retourner devant leurs électeurs avec des chances raisonnables d’être réélus. Quant aux 27 pays de l’Union, malgré les menaces brandies par la France, ils n’ont guère d’autre choix que d’être aussi accommodants que possible pour préserver les intérêts de tous et obtenir un accord raisonnable. Le plus tôt sera le mieux, mais Londres vaut bien une messe et la diplomatie est la science de la patience.