
Ne mégotons pas
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 30 mai 2025 10:56
- Écrit par Claude Séné

Sur le fond de la question du tabac, les Français sont à peu près tous d’accord : fumer, c’est mal. Déjà, le fumeur lui-même est généralement conscient de prendre des risques importants sur sa propre santé, et s’il l’avait oublié, le cigarettier est tenu de le lui rappeler grâce au slogan obligatoire : « fumer tue » et aux photos dissuasives de l’état des organes exposés au tabagisme. D’ailleurs, beaucoup de fumeurs aimeraient réussir à s’arrêter, et font régulièrement des tentatives pour stopper ou diminuer leur consommation. Leurs efforts ne sont pas toujours couronnés de succès, pour une raison évidente : la dépendance au produit. Physiologiquement, l’organisme réclame sa dose, comme dans toute addiction, mais l’accoutumance est aussi psychologique et comportementale, ce qui renforce la difficulté.
L’état a fait depuis longtemps le constat que les maladies liées au tabac, à commencer par le cancer du poumon, coûtaient cher à la collectivité et causaient des décès prématurés, ce qui justifie une intervention des pouvoirs publics pour diminuer le tabagisme. Les différentes études sur le sujet ont démontré que c’était le renchérissement du tabac qui était le plus efficace des moyens de faire baisser la consommation, et le prix du paquet n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Cependant, le fumeur le plus invétéré, même très motivé par le souhait de se débarrasser du tabac pour des raisons financières, aura du mal à tenir ses bonnes résolutions pour ce seul motif. La ministre de la Santé, Catherine Vautrin, semble vouloir actionner un autre levier, en décrétant l’interdiction de fumer au 1er juillet prochain dans tous les lieux susceptibles d’être fréquentés par les enfants : abords des écoles, plages, parcs ou stades, sous peine d’une amende de 135 euros. C’est toujours le portefeuille qui est visé, mais on s’adresse au citoyen plus qu’au consommateur qui pourra continuer à s’enfumer partout où ce ne sera pas interdit. À terme, c’est tout l’espace public qui pourrait être concerné.
Ce changement de stratégie a sa propre logique et s’ajoutera à l’arsenal existant, mais dans une modalité répressive qui s’oppose à la stratégie précédente, plus bienveillante et persuasive. Elle fait ressortir la contradiction d’un état qui fait tout pour dissuader l’usage du tabac, alors qu’il en est le seul vendeur légal et qu’il en tire des bénéfices substantiels. La prohibition ne s’appliquera pas aux terrasses des cafés, malgré le mauvais exemple qu’elles induisent, et les dommages « collatéraux » du tabagisme passif. Comment ne pas y voir la crainte d’une contestation des cafetiers, qui s’ajouterait à d’autres « grognes » pour des raisons très différentes, celles des taxis, des paysans, des cheminots et que sais-je encore. Quant à la vapoteuse, si décriée ces dernières années, elle est épargnée du dispositif, et ne sert plus de repoussoir absolu comme précurseur du « vrai tabagisme ».