Prescription

Comme un pied de nez, ou un bras d’honneur, à la journée internationale des droits des femmes, le député écologiste Denis Beaupin a obtenu un non-lieu dans l’affaire où il était poursuivi pour agression sexuelle et harcèlement à l’encontre de huit femmes, pour cause de prescription des faits. Le tribunal n’écarte nullement la crédibilité des plaignantes ni la possibilité de qualifier les faits pénalement, mais constate que la loi permet l’impunité au bout de trois ans, ce qui est un délai ridiculement court. Un texte a d’ailleurs été voté en février pour doubler cette durée, qui reste notoirement insuffisante, mais il n’est pas rétroactif.

Je m’interroge fortement sur l’utilité sociale de définir un délai de prescription, d’ailleurs variable selon les situations, alors que les crimes les plus graves sont, eux, imprescriptibles. Quelle que soit l’ancienneté des faits, les victimes ont droit, au minimum, à ce que leur plainte soit examinée, et que le préjudice subi soit reconnu, à défaut de pouvoir, dans la plupart des cas, être réparé. Il me semble que c’est la mission de la justice, en même temps qu’elle définit le quantum de pénalisation des auteurs, si nécessaire. Dans ce cas particulier, une telle décision est interprétée par Denis Beaupin comme une reconnaissance de son innocence, ce qui est un peu fort de café. Pire encore, il fait savoir son intention de porter plainte contre ses accusatrices et le parti EELV pour dénonciation calomnieuse, ce qu’il s’est bien gardé de faire auparavant. Ben, voyons ! pourquoi se gêner ?

On connait le système de défense de Denis Beaupin, commun à tous les agresseurs : les victimes seraient consentantes. Il admet à la rigueur une « drague un peu lourde ». Ce qui amène à se poser des questions sur la façon dont Denis Beaupin se représente les relations entre les hommes et les femmes dans notre société. Je serais tenté de lui conseiller de consulter afin d’obtenir une prescription médicale, qui pourrait être, par exemple, de se purger le cerveau avec quatre grains d’ellébore, comme dit le lièvre de la fable. Si Denis Beaupin se considère comme un chaud lapin, il me parait se faire énormément d’illusions sur sa capacité de séduction. Il serait grand temps que quelqu’un lui explique, comme à un petit garçon de maternelle, que le meilleur moyen de plaire à une fille n’est pas de lui tirer les cheveux et d’essayer de l’embrasser de force. Cela ne s’appelle plus de la drague, mais de l’agression. Ce qu’un petit don Juan de cour de récré est capable de comprendre ne devrait pas échapper à un aussi fin politique.