
Le monde à l’envers
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le dimanche 7 septembre 2025 10:29
- Écrit par L'invitée du dimanche

L’affaire Henriette Caillaux, scandale de la IIIe République.
Les protagonistes : Joseph Caillaux, ex-président du Conseil, ministre des Finances sous le gouvernement Doumergue, est un homme politique dont l’itinéraire est allé des républicains modérés au parti radical dont il est devenu leader. Pacifiste convaincu, il essaie d’éviter la guerre avec l’Allemagne et il préconise un seul impôt progressif sur le revenu. Il se rapproche des socialistes, Jaurès sera un de ses soutiens, il participera d’ailleurs à la création de « l’Humanité… »
Henriette Caillaux, sa femme, épousée après le divorce d’un premier mariage, et son ex-femme Berthe Gueydan, humiliée par cette rupture.
Gaston Calmette, directeur du journal le Figaro.
Les faits : le journal le Figaro, journal de droite, commence une enquête de dénigrement du ministre des Finances par une série de 138 articles en 95 jours…
Après des attaques politiques, on lui reproche d’être un politicien sans scrupule, on met en cause son honnêteté, il aurait reçu de l’argent pour ses campagnes électorales, il intervient auprès de la justice en faveur d’escrocs (proches des milieux d’affaires, il est lui-même millionnaire) puis attaque de sa vie intime…
La droite catholique l’accuse de détruire le modèle traditionnel de la famille, la presse de droite, décrit son divorce comme une faillite morale, preuve du délitement de la société.
Son ex-femme, pour une vengeance personnelle, transmet au journal une correspondance intime avec Henriette avant leur mariage !
Informé, Joseph Caillaux essaie d’en faire interdire la publication, en vain, faute d’arguments juridiques : les documents n’ont pas été volés, pas dupliqués, pas inventés.
Le président Poincaré refuse d’intervenir, ce serait suicidaire pour lui avant les élections législatives d’avril, même si Caillaux a des chances, si la gauche l’emporte, d’être président du Conseil…
Il est une menace pour la droite que rien n’arrêtera.
Henriette, bourgeoise attachée à sa réputation, vit les événements très mal, ne voyant pas de solution juridique, elle prend le parti d’agir.
Le 16 mars 1914, au cours du déjeuner, le ministre aurait dit « j’aimerais pouvoir casser la gueule à Calmette ». Henriette, qui a pensé à commettre l’irréparable en se suicidant, continue sa journée, et lui vient l’idée de faire peur à Calmette. Elle se rend à l’armurerie où son mari se fournit pour son matériel de chasse, elle achète un pistolet Browning, petit, léger, facile à dissimuler. Il est 16 heures. Elle décide d’aller au Figaro, écrit une lettre à son mari : « tu voulais casser la gueule à Calmette, c’est moi qui ferai justice, la France et la République ont besoin de toi. »
17 h 15 au Figaro, elle attend l’arrivée de Gaston Calmette, qui la reconnaît et la reçoit par galanterie à 18 heures : « je vous écoute », elle annonce l’objet de sa visite, la cabale médiatique contre son mari, puis, elle tire deux fois sur lui, il cherche à fuir, elle le poursuit et continue à tirer.
Le personnel du journal arrive, Calmette respire encore « je n’ai fait que mon devoir, je l’ai fait sans haine », il décédera cinq heures après à l’hôpital d’une hémorragie abdominale.
Henriette Caillaux reconnaîtra les faits, « j’espère ne pas l’avoir trop blessé, je voulais lui donner une leçon, puisqu’il n’y a pas de justice en France, c’était le seul moyen d’en finir » et sera conduite à Saint-Lazare.
Dimanche prochain, le procès.
L’invitée du dimanche