Roulette russe

Vous en connaissez tous le principe. Il s’agit d’un jeu de hasard où un ou plusieurs joueurs vident le barillet d’un révolver à six coups, en n’y laissant qu’une seule balle, puis font tourner le magasin à l’aveugle avant d’appuyer sur la détente de l’arme pointée sur sa propre tempe. Il a alors 5 chances sur 6 de tomber sur une chambre vide et d’avoir la vie sauve. Il paraît que cela procure des émotions à nulles autres pareilles. Wladimir Poutine a inventé une variante de ce qu’il faut bien appeler un jeu de cons, et il est en train de l’utiliser en Ukraine.

Cette fois-ci, on n’enlève aucune balle. 100 % des joueurs doivent tenter leur chance, à l’exception du maitre du Kremlin qui regarde et qui compte les morts, dans son propre camp comme dans le camp adverse. Il est prêt à se battre jusqu’au dernier soldat ukrainien, et l’extinction de la totalité de ses « frères et sœurs » civils, si nécessaire. À chaque pression sur la gâchette son lot de surprises : tantôt un immeuble, tantôt un hôpital, tantôt une maternité. Ah ! très bien, la maternité, ça compte double. Rien de plus abominable pour frapper les imaginations que ces femmes enceintes et leurs nouveau-nés sous les bombes. Naturellement, le dictateur sait bien qu’il enfreint ainsi les règles de la guerre. Une expression paradoxale s’il en est. Comme si l’on pouvait faire proprement une sale guerre. Mais passons. Poutine ne veut pas endosser le costume du « bad guy ». N’oublions pas que c’est l’Union soviétique qui a inventé l’agit-prop, et que la propagande russe est prête à tous les mensonges pour se donner le beau rôle dans tous les cas.

La désinformation sur la maternité de Marioupol est allée jusqu’à accuser l’Ukraine d’une mise en scène et l’utilisation de comédiens pour accuser faussement l’armée russe. Il faudra bien un jour que les responsables répondent de ces crimes de guerre, jusqu’au sommet de l’état, qui a certainement décidé en dernier ressort les massacres des populations civiles. Le propre de la roulette russe, la vraie, c’est de mettre en jeu la survie de celui qui tient l’arme. Wladimir Poutine s’est engagé dans une fuite en avant, dans laquelle il brandit tour à tour toutes les menaces, y compris celle de la guerre nucléaire, dont son pays ne se relèverait pas plus que ceux qu’il considère comme ses ennemis, en tablant sur une reculade des occidentaux, s’ils étaient mis au pied du mur. La détermination des Ukrainiens lui donne tort. L’issue militaire n’apparait plus aussi inéluctable. Les patriotes ukrainiens affirment même qu’ils peuvent gagner cette guerre, et cette hypothèse n’est plus totalement exclue, si la résistance tient assez longtemps pour que l’argent, le nerf de la guerre, vienne à manquer au dictateur belliciste.