L’Amour encore…

Puisqu’il est partout, puisqu’il est ce qui nous garde vivants, on le trouve dans des expressions usuelles qui, chacune, sécrètent une situation précise, il y a l’amour éternel, l’amour fou, l’amour aveugle, l’Amour vache, l’amour platonique… (c’est une tendresse mutuelle qui s’exprime par des attentions et des gestes quand la libido diminue par exemple, ou quand il est soumis à des interdits moraux ou culturels), l’Amour vache, s’exprimant souvent par des moqueries portant atteinte au physique, l’amour filial, les amours ancillaires un peu désuètes j’espère, relations galantes avec les servantes, sans oublier l’amour-propre extension légitime au nom de l’amour de soi, et que l’on n’aime pas voir blessé, car il est une atteinte à sa dignité, à ses valeurs, à son ego.

Toutes ces situations font référence à la présence réelle ou virtuelle des personnes concernées auxquelles s’adresse ce sentiment, il n’en est pas de même quand ce sentiment s’adresse à une entité plus abstraite : la patrie.

 L’amour de la patrie, recueille des marques incontestables d’attachement, ne serait-ce que parce que tout citoyen lui est redevable d’être protégé contre toute forme d’agression.

Mais qu’est-ce que cet amour de la patrie ? Se sentir appartenir à un peuple de compagnons et d’amis ? C’est donner à sens unique, agir en accord avec ce que nous exprimons, avec la volonté de la servir ? C’est un sentiment capable du meilleur comme du pire, c’est en son nom qu’ont été livrées les plus grandes guerres, au cours desquelles certains se sont montrés héroïques, prêts à donner leur vie pour un combat idéologique préservant l’intégrité de leur pays. Et ils sont nombreux ceux à qui nous sommes redevables de notre liberté, n’oublions pas cependant que dans certaines guerres, l’idéologie semble lointaine « on croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels » Anatole France 1922 !

Mais c’est aussi la source du sentiment national, qui, poussé à l’extrême, dérive vers le chauvinisme et pire encore vers le nationalisme qui alimente les positions politiques extrêmes : préférence nationale, lutte contre l’immigration, repli identitaire…

En cette période électorale, les politiques font bon ménage avec l’amour, il est usuel d’entendre de leur part des déclarations d’amour pour la France. Ces candidats, qui disent n’être là que pour la servir, et sont prêts à toutes les séductions pour nous convaincre de leur sincérité, veulent surtout faire oublier leurs ambitions personnelles et leur idéologie profonde, raciste et xénophobe plus enclins à séparer qu’à réunir…

« Le rassemblement des Français ne peut se faire qu’autour de l’amour de la France » Marine Le Pen 2017… « nous sommes réunis, car nous avons un point commun : l’amour de la patrie » 2022 Lille. Sans oublier Zemmour qui a le culot de s’approprier Verlaine : « l’amour de la patrie est le premier amour, et le dernier amour après l’amour de Dieu… »

Difficile de ne pas être inquiets dans ces temps lourds de menaces politiques, guerrières, sociales, écologiques, comme j’aimerais revenir au temps de l’enfance où l’on pouvait demander à la marguerite de nous rassurer sur nos amours enfantines « il m’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout… »

L’invitée du dimanche