La fin des godillots ?

Quand les députés macronistes ont été élus en juin 2017, dans la foulée des présidentielles, la tentation était grande de les traiter de « godillots » puisqu’ils se revendiquaient d’un attachement sans faille envers leur leader et se déclaraient, comme lui, « en marche » vers un avenir qu’ils espéraient radieux. Comme les soldats de Crimée équipés par Alexis Godillot et beaucoup plus tard les fidèles du Général de Gaulle votant sans le moindre état d’âme tous les textes soumis à leur ratification, les députés de la majorité avaient jusqu’ici marché au canon, sous la menace d’excommunication au premier lever de sourcil.

Comme les chatons qui naissent aveugles, les yeux de certains de ces députés se sont dessillés, et les défections se sont succédé, au point de devoir compter sur l’allié Modem pour conserver la majorité à l’Assemblée nationale. Le vote sur les néonicotinoïdes, remporté de justesse par le gouvernement, a montré que le soutien aux propositions du pouvoir n’allait plus de soi. Une nouvelle étape a été franchie avec la proposition de loi sur l’IVG, déposée par un groupe dissident de l’ancienne majorité, dont le seul nom est tout un programme soulignant en creux la vacuité du corpus idéologique du parti présidentiel : Écologie, Démocratie, Solidarité. Aucune consigne de vote n’avait été donnée, ce qui a évité un camouflet au gouvernement et au président de la République, plutôt hostile au projet et qui aurait préféré visiblement que la question soit examinée plus tard, ou même pas du tout. Il est d’usage de laisser le libre choix de leur vote aux députés lorsqu’il s’agit de textes touchant à la morale ou à l’éthique, mais la position du gouvernement reflète surtout son embarras.

En effet, dans un débat binaire comme celui de l’allongement du délai pour pratiquer une IVG de 12 à 14 semaines, la position préférée d’Emmanuel Macron, le fameux « en même temps », est intenable. Il ne sait que trop bien que prendre parti en la matière lui fera perdre des voix, soit à droite, soit à gauche, et peut-être même des deux côtés de l’échiquier politique, si tant est qu’il lui reste des sympathisants dans le camp progressiste. Faute de mieux, il va escompter qu’en ces temps de pandémie les Français ont d’autres chats à fouetter, les organisations les plus « tradi » peinent à mobiliser contre la loi en question, et l’on peut compter sur le gouvernement pour faire traîner au maximum les démarches de la navette parlementaire afin de repousser l’adoption définitive au plus tard possible. Avec un peu de chance, il s’évitera le vote solennel par les « malgré nous » avant la fin du quinquennat, et il laissera son successeur s’en débrouiller.

Commentaires  

#1 jacotte 86 09-10-2020 11:39
fin des godillots? fuite des rats voyant le navire prendre un peu l'eau? découverte d'une conscience politique? on rêve un peu que le tout combiné montre la porte de sortie à Jupiter
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