À vos souhaits !

On avait coutume de dire autrefois que lorsque Billancourt éternuait, c’est toute la France qui s’enrhumait. Une manière de souligner à quel point Renault, enfin, la régie nationale des usines Renault, était un laboratoire social emblématique d’une reconnaissance de la noblesse de certains métiers manuels. Lorsque ce fleuron de notre industrie nationale était menacé, on savait que c’était toute la branche de la métallurgie et de l’industrie mécanique qui était en danger, et l’éventualité d’une grève pouvait suffire à remettre les partenaires sociaux autour d’une table de négociation.

Les étudiants qui se sont inscrits sur la plate-forme Internet Parcoursup ont donc reçu leurs premières réponses aux souhaits qu’ils avaient émis et le moins que l’on puisse dire, c’est que la plupart d’entre eux ne sont pas plus avancés. Au mieux, les lycéens possédant un dossier « béton » auront une réponse positive, quelques refus, et une écrasante majorité de mises en liste d’attente jusqu’à ce que des places se libèrent. Du moins en ce qui concerne les filières généralistes. Car le ministère reconnait à demi-mot qu’il n’en va pas de même pour les filières dites « sélectives », telles que les STAPS ou les études de médecine, comme si la sélection n’était pas de fait généralisée avec ce nouveau système. À tel point qu’il a fallu prévoir un dispositif de secours pour examiner le cas des lycéens qui n’auraient reçu que des réponses négatives. Une commission académique sera chargée de récupérer les « laissés-pour-compte » afin de leur proposer les fonds de tiroir des filières délaissées par les meilleurs élèves où il resterait encore de la place.

Même avec une forte loupe, il me parait difficile de voir la différence entre ce processus et une sélection en bonne et due forme. Une chose est certaine. Les candidats à une place à l’université devront tous maitriser parfaitement l’outil Internet pour s’y retrouver dans la jungle des listes d’attentes et évaluer leurs chances d’être sélectionnés en fonction de leur rang, sans négliger le couperet de la réponse aux propositions reçues avant la date limite, sous peine de perdre le bénéfice de l’offre. Tout est réuni pour que le futur étudiant accepte la première et souvent la seule proposition qui lui sera faite. Il est encore un peu tôt pour savoir si le système atteint au moins son but qui est de caser les lycéens dans une filière ou une autre, sans laisser trop de jeunes « sur le carreau ». L’apparent libéralisme qui consiste à demander aux jeunes d’émettre des vœux s’apparente pour moi à un entonnoir dans lequel il faut bien passer, sachant que le nombre de places offertes est contraint. Je crains bien que pour beaucoup il ne s’agisse que de vœux pieux.