Insignifiant

Je sais. Quand on est confronté au malheur absolu comme celui provoqué par la folie islamiste en Espagne et ailleurs, beaucoup de choses semblent insignifiantes, et il peut paraître dérisoire de s’intéresser aux déclarations provocatrices d’un chroniqueur sportif, qui juge qu’être payé 700 euros pour une émission de télévision est « assez insignifiant niveau pognon » pour justifier sa future participation à Touche pas à mon poste qui va reprendre imperturbablement à la rentrée malgré les amendes infligées à la chaine C8 pour les dérapages incontrôlés de son animateur, Cyril Hanouna.

Pierre Ménès, puisqu’il s’agit de lui, trouve en effet que percevoir 2800 euros bruts par mois pour 4 émissions en moyenne ne constitue pas un pactole, compte tenu de ses autres sources de revenus, même s’il reconnait que beaucoup de Français aimeraient toucher ce salaire. Déjà consultant sur Canal plus, il a aussi décroché des contrats publicitaires qui lui assurent des rentrées très confortables puisqu’il aurait touché en 2013 environ 250 000 euros. Évidemment, s’il se compare avec les stars du ballon rond qu’il tutoie, et dont les salaires se comptent en millions, il est encore loin du compte. Aussi loin d’ailleurs que d’approcher leur technique avec un ballon. Sa spécialité, c’est plutôt de tailler des costards. Il a réussi à se fâcher avec la moitié de la planète foot grâce à des jugements définitifs sur les joueurs, les entraîneurs et les dirigeants. La liste en serait trop longue pour tenir dans le cadre de ce billet, et notamment l’ensemble du club parisien du PSG, supporters compris.

Malgré ses critiques systématiques et son sexisme assumé, Pierre Ménès a longtemps eu le statut du bon gros sympathique à qui l’on pardonnait ses sorties médiatiques. Sa cote de popularité s’est envolée quand il a été victime de la maladie, un syndrome assez rare, surnommé la maladie du soda, une forme de cirrhose non alcoolique, qui l’a conduit à être greffé du foie et d’un rein. Son absence des plateaux, conjuguée à un amaigrissement spectaculaire, lui a attiré la compassion générale et le soutien du milieu sportif, pas rancunier sur ce coup-là. Sa décision de rejoindre le trublion du PAF à la rentrée pourrait modifier cet apriori favorable. La déclaration maladroite concernant le caractère insignifiant de son cachet était destinée à désamorcer l’accusation d’avoir accepté la proposition de C8 par appât du gain. Elle pourrait se retourner contre lui. À mon sens, aller manger dans la gamelle d’Hanouna sans même avoir l’excuse d’y être poussé par la faim est un caractère aggravant. Loin de constituer une circonstance atténuante, c’est un facteur constitutif de l’illustration de la bêtise humaine. À mon avis, il ne tardera pas à regretter sa décision.