Mes amis, au secours…

C’est par ces mots que Marie Joseph Henry Grouès, plus connu sous le nom d’abbé Pierre qu’il avait adopté pendant la guerre en s’engageant dans la résistance contre l’occupant nazi, commençait son appel diffusé sur les ondes de Radio Luxembourg le 1er février 1954. Il y dénonçait le mal-logement et les conditions de vie inhumaines de ceux qui n’avaient d’autre lieu de subsistance que la rue, par tous les temps. Hasard terrible, 70 ans plus tard presque jour pour jour, un tout nouveau Premier ministre prononçait devant les 577 représentants de la nation française le discours destiné à définir les grands axes de sa politique pour les mois et les années à venir.

Non seulement il y a toujours trop de personnes réduites à chercher tous les jours un hébergement d’urgence, y compris des familles avec femmes et enfants, mais la situation du logement social n’a jamais été aussi précaire. Il existe pourtant une loi, dite SRU, relative à la solidarité et au renouvellement urbains, adoptée en 2000, qui impose aux communes de réserver 20 à 25 % de ses constructions au logement social, sous peine de pénalités, dont s’acquittent joyeusement et même avec fierté les élus de certaines municipalités qui ne veulent surtout pas de la moindre mixité sociale. Dans les beaux quartiers, on préfère rester entre soi. Les gouvernants ont trop souvent fermé les yeux, voire encouragé ces pratiques ségrégationnistes par l’instauration de dérogations diverses et variées. Mais Gabriel Attal a bien l’intention d’aller encore plus loin, en annonçant qu’il voulait intégrer dans le calcul les logements dits « intermédiaires », ceux dont les loyers sont au-dessus du plafond des HLM, et qui ne peuvent être payés que par une clientèle aisée, abusivement baptisée classe moyenne.

Car la cible du discours de Gabriel Attal, dans ce domaine comme dans d’autres, est clairement une classe sociale privilégiée, qui gagne très correctement sa vie, sans toutefois disposer du patrimoine des ultrariches, et qui se juge défavorisée parce qu’elle dépasse allègrement les plafonds de revenus donnant accès aux aides de l’état. Si ce tour de passe-passe promis par le Premier ministre est mis en œuvre, on peut être certain qu’il n’amènera pas un seul logement social supplémentaire, ni peut-être même aucun logement tout court tant le secteur du BTP est en chute libre en ce moment et l’accès au logement affecté par d’autres facteurs économiques. C’est une régression sociale sans précédent, dénoncée comme telle par les maires des plus grandes villes, à l’exception de ceux qui vont économiser les pénalités encourues auparavant. S’il en était besoin, l’absence remarquée de ministre du Logement, toujours pas désigné par le pouvoir, suffirait à illustrer le peu de cas du Président Macron à l’égard d’un pan très important de l’économie, qui devrait servir de levier à l’état pour lutter contre les inégalités sociales.

Commentaires  

#1 jacotte86 03-02-2024 11:48
une mesure inacceptable de plus dont les médiats ne s'indignent pas beaucoup et qui va passer sans crier gare!
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