Arithmétique niveau CE1

Les calculettes étaient de sortie hier dans les états-majors du gouvernement et des partis politiques représentés au parlement. Même si la tendance était visiblement à l’adoption du texte de la droite sénatoriale plus ou moins modifié par la Commission mixte paritaire, le suspense demeurait entier sur le vote des députés de la majorité relative présidentielle, profondément divisée sur un texte très orienté, beaucoup plus dur que la mouture gouvernementale rejetée sans examen. Les spéculations allaient bon train quand le Rassemblement national a créé la surprise en annonçant qu’il voterait le texte, alors que jusqu’ici il hésitait entre abstention ou vote contre.

L’issue du scrutin ne faisait alors plus de doute, mais le pouvoir était embarrassé d’un soutien soulignant son virage à droite toute, sabordant sa théorie d’un « en même temps » de plus en plus difficile à faire croire. Le président faisait alors savoir qu’il ne tiendrait compte du vote que s’il était acquis sans l’appoint de l’extrême droite, dans une tentative désespérée de ne pas s’aliéner ce qu’il reste de « l’aile gauche » de sa formation. Dans la foulée et une procédure accélérée, le vote avait lieu et le texte était adopté sans surprise par 349 voix pour, à 186 contre. Un résultat sans appel, mis à part que si les 88 députés du RN avaient tous voté contre, le texte ne passait pas, sauf si les 62 députés de la majorité manquant à l’appel avaient compensé. Des spéculations purement formelles, mais qui démontrent la fragilité du pouvoir depuis les législatives de 2022.

Le président et le gouvernement ne semblent pas avoir d’état d’âme sur le sujet, laissant entendre qu’ils sont prêts à revenir sur leurs positions si les circonstances le permettent, les promesses n’engageant que ceux qui les croient. C’est ainsi que la Première ministre plastronnait sur France Inter sur le maintien de l’Aide médicale d’état qu’elle s’est pourtant engagée à revoir très rapidement. Quant à Emmanuel Macron, il s’apprêterait à saisir le Conseil constitutionnel pour abroger des articles qu’il a tenu à faire voter coute que coute. On voit par là que ce ne sont pas les scrupules qui étouffent l’exécutif, bien que des rumeurs de démission de plusieurs ministres aient circulé, et que des remaniements semblent incontournables, quoique peu efficaces. Quant à l’exercice de décompte des votes du RN, il me parait vain. D’une part, le Président ne peut pas récuser un vote législatif, même s’il ne lui plait pas, et d’autre part, l’essentiel est ailleurs. Il réside dans le fait que le gouvernement et le président valident et soutiennent un texte tellement marqué à droite et à la limite de la xénophobie, qu’il ne pose aucun problème de conscience au parti de Marine Le Pen, qu’ils avaient pourtant promis de faire reculer, avec le résultat que l’on sait.