Le pot de terre
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 17 août 2018 10:16
- Écrit par Claude Séné
La vie des personnes handicapés est loin d’être un long fleuve tranquille. Bien que des progrès significatifs aient été accomplis dans l’évolution de la législation et que l’accessibilité soit devenue la règle, de nombreuses exceptions s’opposent encore à une certaine normalité dans les situations de la vie courante. Il y a aussi parfois des reculs incompréhensibles, sauf à accepter la seule et unique logique financière, tels que l’amendement à la loi ELAN qui réduit de 100 % à 10 % le nombre de logements neufs accessibles directement aux personnes handicapées, les autres devant simplement être aménageables moyennant un surcoût différé.
Il y a peu, un couple de personnes aveugles n’a pas pu rentrer dans le restaurant asiatique où il souhaitait prendre un repas, du fait de la présence de leur chien guide, pourtant expressément autorisé par la loi, ce qu’ignorait visiblement le patron du restaurant, persuadé de son bon droit. En revanche, un jeune étudiant, handicapé moteur, qui s’était vu refuser l’accès dans un magasin Carrefour avec son chien d’accompagnement, suspecté par le gérant de vouloir lécher les produits à sa portée, a obtenu gain de cause après son dépôt de plainte, et a même reçu les excuses de la direction du magasin. En effet, les chiens guide ou les chiens d’accompagnement ne sont pas des chiens comme les autres. Ils ont reçu pendant deux ans au minimum une éducation spéciale dans des familles d’accueil et sont parfaitement entraînés au travail pour lequel ils sont préparés. De ce fait, ils sont autorisés par la loi à pénétrer dans tous les lieux publics, y compris ceux qui distribuent des denrées alimentaires. Les contrevenants s’exposent à une amende de 135 euros, et peuvent être forcés d’accepter la présence de l’animal.
Si le jeune homme toulousain a réussi à faire plier la chaine de distribution Carrefour, il s’est cassé les dents avec la SNCF. Il avait déposé une plainte en 2016 contre la société nationale de transport pour discrimination. Elle avait été classée sans suite. Sans se décourager, l’étudiant a renouvelé sa plainte en juin dernier car l’accès aux toilettes est toujours impossible pour les personnes en fauteuil roulant. Le jugement vient de tomber. Non seulement Kévin a été débouté de sa plainte, mais il a de surcroît été condamné à rembourser les frais de justice à la SNCF, qui est, comme on le sait, en proie à de graves difficultés financières du fait des grèves à répétition. Nan, je déconne, le bénéfice net de la compagnie s’élève à 1,3 milliards d’euros en 2017, soit plus du double de l’année précédente. Mais la loi de 2015, dans sa grande mansuétude, a donné à la SNCF jusqu’à 2024 pour se mettre aux normes d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, comme on dit pudiquement. D’ici là, le pot de fer aura toujours raison.
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