
Au voleur !
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 19 juin 2025 11:33
- Écrit par Claude Séné

Hier, c’était le 85e anniversaire du fameux appel du 18 juin lancé par le général de Gaulle à la BBC, qui symbolise la résistance à l’envahisseur nazi, et c’est précisément le jour choisi par Bruno Retailleau pour initier une campagne d’adhésion au parti dont il a pris le contrôle récemment, les Républicains, et dont il espère faire sa rampe de lancement pour l’élection présidentielle de 2027, ou plus tôt, si affinités. Toute hypothèse d’une simple coïncidence serait évidemment nulle et non avenue. La ficelle est un peu grosse, mais correspond bien à la clientèle potentielle visée : il s’agit de ratisser large en attirant « la France des honnêtes gens ».
Le sous-entendu est évident. Si tous les honnêtes gens se précipitent chez le ministre de l’Intérieur, comme il l’espère, quelle clientèle devront se partager les autres formations politiques, sinon les gens malhonnêtes ? Le procédé ne me parait pas d’une honnêteté excessive, pour ma part, et s’apparente à de la malhonnêteté intellectuelle, toute simpliste qu’elle soit. En tentant naïvement de s’approprier l’exclusivité des bons sentiments et de la probité, le tout nouveau président des LR perpétue une tradition largement utilisée par la droite, y compris dans le gaullisme historique et ses différents avatars. Le nom actuel du parti de Bruno Retailleau, les Républicains, insinue sans le dire expressément qu’il représente tous ceux qui se réclament de la République, ce qui est, au minimum, un abus de langage, et s’apparente à du vol manifeste. On peut voir outre-Atlantique, les effets délétères d’une telle confusion des genres quand un homme seul préempte à la fois la qualité de « Républicain », et celle de citoyen américain, en se faisant acclamer par des « USA, USA » niant ainsi jusqu’à l’existence et la légitimité d’une autre moitié de la population.
Ces honnêtes gens, que le futur candidat à la magistrature suprême espère rassembler, sont invités à s’identifier à des « héros » représentés sur les affiches de la campagne. Une policière, un pompier, une infirmière ou un chef cuisinier photographiés de dos. Je ne suis pas certain que ces symboles de l’état pour les premiers, la réussite sociale pour le dernier cité, soient des modèles d’identification dans les quartiers défavorisés. Nicolas Sarkozy en son temps avait déjà joué sur le repoussoir de « la racaille » qu’il se proposait de nettoyer « au karcher ». Les résultats en ont été plus que mitigés. Aux honnêtes gens de Bruno Retailleau, je préfère ceux que Georges Brassens appelle ironiquement les « braves gens », ceux qui lui ont fait sa mauvaise réputation dans la chanson du même nom, à force de ne pas vouloir marcher au pas ni de rattraper les voleurs de pommes.