Au voleur !
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 28 septembre 2016 11:40
- Écrit par Claude Séné
Le livre de Patrick Buisson qui doit paraitre demain est basé sur des enregistrements faits à l’insu de son plein gré de conversations avec Nicolas Sarkozy pendant qu’il était son conseiller. Un procédé pour le moins indélicat même s’il s’applique à un personnage guère plus recommandable. Il est fait notamment reproche à l’ancien chef de l’état de manquer de sincérité, ce qui ne manque pas de sel dans la bouche de Patrick Buisson, dont la franchise n’apparait pas comme la qualité première. On peut lui reconnaitre une certaine constance dans les idées d’extrême-droite, lui qui a dirigé « Minute » ou « Valeurs actuelles ».
Qui aime bien châtie bien, dit-on. Alors Patrick Buisson doit adorer Nicolas Sarkozy car il ne lui fait aucun cadeau. Il révèle ses tentations de rapprochement avec le Front national de Jean-Marie Le Pen au moment de la présidentielle de 2007, ses magouilles pour nuire à son rival de l’époque, Dominique de Villepin, ses jugements à l’emporte-pièce sur ses « camarades » de parti ou ses alliés, toutes choses au fond qui sont surtout des confirmations plutôt que des révélations. Le portrait est quand même ravageur dans la mesure où il démontre que Nicolas Sarkozy ne semble pas posséder de convictions profondes mais qu’il préfère faire des coups. Il le compare à un trader qui cherche le profit immédiat plutôt que le long terme. Patrick Buisson ne se contente pas de dérober le contenu de ces conversations secrètes pour les utiliser à son profit, il a également détourné le titre d’un journal gauchiste pour en parer son ouvrage, qui s’appelle donc « la cause du peuple ».
Il ne faut pas manquer d’air pour utiliser cette formule qui symbolisait dans l’immédiat après 68 la lutte pour les idéaux qui s’était exprimée sur les barricades parisiennes et provinciales. Le journal, un temps dirigé par Jean-Paul Sartre lui-même, était l’organe de la Gauche Prolétarienne, un groupuscule gauchiste prêt à faire le coup de poing avec les amis de Patrick Buisson, Occident ou Jeune Nation en tête. Il faut croire que la marque n’avait pas été déposée. Peut-être parce que le journal des années 70 avait lui-même repris le titre d’une publication éphémère de Georges Sand au siècle précédent. Ce larcin démontre involontairement la nature profonde de son auteur et vise également sa victime désignée. Ce que raconte ce pavé de 400 pages, c’est en réalité la cause du populiste, celui qui est prêt à tout pour accéder au pouvoir. Buisson est de la race des Pierre Juillet ou Marie-France Garaud qui voulaient être les faiseurs de roi à défaut de l’être eux-mêmes. Et le peuple est le cadet de ses soucis.