Baptême du feu
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 27 janvier 2024 10:54
- Écrit par Claude Séné
Gabriel Attal a donc subi sa première crise sociale en l’absence du pompier pyromane en chef, Emmanuel Macron, opportunément en déplacement dans une des plus grandes dictatures du monde, la plus peuplée, en tout cas, mais ceci est une autre histoire. L’occasion pour le nouveau Premier ministre de lancer un ballon d’essai afin de tester les capacités de résistance des agriculteurs qui menacent de bloquer le pays s’il n’est pas fait droit à leurs revendications. Comme il fallait s’y attendre, le gouvernement est arrivé en Haute-Garonne, l’épicentre du mouvement social, avec les mains presque vides, alors que les agriculteurs en colère avaient prévenu qu’ils ne se contenteraient pas de belles paroles et de vagues promesses.
Ce qui a manqué à Gabriel Attal, c’est le nerf de la guerre. Tout juste une enveloppe ridiculement faible de 50 millions en faveur de la filière bio, très largement insuffisante, et le versement déjà prévu d’indemnisation aux victimes des aléas climatiques. Mais l’escroquerie la plus scandaleuse concerne l’abandon de la taxation sur le gasoil non routier. Le Premier ministre fait donc passer pour un cadeau fiscal la non-mise en œuvre d’une taxation à venir, ce qui ne mettra pas un centime de plus dans la poche des agriculteurs. Quant aux autres mesures envisagées, elles restent dans le champ des paroles verbales, avec l’engagement de simplifier les démarches administratives et de mettre l’Agriculture « au-dessus de tout » dans notre pays, sans changer les dirigeants, qui sont souvent, eux, en dessous de tout, et notamment des réalités paysannes. À l’exception d’un responsable syndical local, qui s’est déclaré en faveur du levage des blocages, tous les syndicats paysans nationaux ont clairement appelé à la poursuite du mouvement, après un week-end pour souffler un peu. Il suffisait d’entendre les concerts de klaxons sur les barrages routiers pour comprendre que la base n’allait pas lâcher la proie pour l’ombre.
En particulier, Arnaud Rousseau, le président du très puissant président de la FNSEA, a considéré que le compte n’y était pas et qu’il fallait aller plus loin. Je le soupçonne d’ailleurs d’avoir fait sienne pour l’occasion la célèbre formule de Ledru-Rollin, s’exclamant : « il faut bien que je les suive, puisque je suis leur chef ! » Au moins accompagne-t-il le mouvement, à défaut de l’avoir initié. J’ai souvenir d’un syndicaliste enseignant qui avait en mai 1968 repris la formule de Maurice Thorez en 1936 : « il faut savoir terminer une grève » en prétendant avoir « pris la température de la base » dont je pensais pourtant faire partie. Du côté présidentiel, il va falloir tirer les leçons de cet échec, et vite, si Emmanuel Macron ne veut pas se laisser engluer dans un nouveau conflit social long, dont il ne sortira pas nécessairement vainqueur et qui laissera des traces négatives durables sur l’opinion.