L’air du temps

Si l’on en croit le président Macron, les Français sont toujours très attachés à la « bagnole », comme il dit, même s’ils seraient prêts à passer à l’électrique à condition de bénéficier de tarifs abordables à l’achat, d’une autonomie suffisante, et de bornes de recharge sur tout le territoire. La voiture reste indispensable dans les zones rurales, où les transports en commun sont souvent inexistants ou malaisés. Mais ils ne sont pas disposés à tout sacrifier pour un moyen de locomotion de plus en plus coûteux, surtout s’il vient en concurrence avec une conscience environnementale en progrès constant.

C’est ainsi qu’une nouvelle manifestation va avoir lieu ce week-end pour s’opposer au projet d’autoroute A69 qui doit relier Castres à Toulouse et qui va contribuer à la bétonisation du département, pour un gain de temps certes appréciable, mais au prix d’un péage relativement élevé. La population est partagée sur l’intérêt du projet, mais les résultats des sondages d’opinion sont variables selon les commanditaires des études, favorables au projet si c’est la société du concessionnaire, défavorables si ce sont les opposants. Même blocage concernant l’impact environnemental du projet. Même l’Autorité environnementale, rattachée au ministère de la Transition écologique, considère ce projet comme anachronique au moment où l’on cherche à baisser les émissions de gaz à effet de serre, de lutter contre le réchauffement climatique et de diminuer la pollution de l’air. Alors que le ministre des Transports, Clément Beaune, semble s’accommoder fort bien de ces nuisances, que le concessionnaire présente comme inévitables.

C’est bien un peu ces enjeux de société qui sont au cœur des choix que sont appelés à faire ceux qui nous gouvernent. Faut-il continuer coûte que coûte à construire toujours plus d’autoroutes, qui plus est en faisant appel à des concessionnaires à but lucratif qui se payent ensuite « sur la bête » avec des tarifs élevés, voire exorbitants ? Ce conflit, qui s’exprime au travers de manifestations plus ou moins massives, montre aussi le décalage évident entre les aspirations des populations et les élus supposés les représenter. 900 élus du Tarn ont signé une pétition en faveur de l’autoroute, également soutenue par la présidente PS de la région Occitanie, qui espèrent un désenclavement de leur département et la création de nouveaux emplois, sur le chantier d’abord, puis induits par un développement économique global. On sait malheureusement que rien n’est automatique en la matière, comme le souligne l’institut national universitaire d’Albi. Les opposants ont déjà formulé un nouveau recours en septembre, et ils réclament un référendum sur la question. Ça aussi, c’est dans l’air du temps, mais pour l’instant, rien ne bouge.