Démocratie directe ou représentative

Je ne vous surprendrai pas si je vous dis pour la énième fois que notre démocratie souffre de ne pas permettre de prendre les décisions en fonction de l’intérêt général, et non pas de celui de tel ou tel groupe de pression ou fraction de la population. Dans une communauté d’une certaine importance, il est évidemment impossible de prendre l’avis de tout le monde sur toutes les décisions. Il est donc normal de se doter d’institutions permettant d’éviter qu’une seule personne, ou un petit groupe, monopolise tous les pouvoirs. Sur le papier, tout fonctionne.

En pratique, il en va tout autrement. La 5e république, déjà bâtie sur le recours à un homme providentiel, le général de Gaulle, a dérivé vers une monarchie constitutionnelle, où le président, tirant sa légitimité du suffrage universel, décide seul, après consultation ou non de ses conseillers. Sauf accident de parcours, il dispose des pleins pouvoirs, grâce à une assemblée acquise à sa cause. Exception à la règle : la cohabitation, où c’est le chef du principal parti d’opposition qui s’assoit dans le fauteuil et règne à peu près de la même façon. Le principal inconvénient de notre système consiste dans le fait que le président, d’où qu’il vienne, ne représente plus, depuis assez longtemps désormais, qu’un pourcentage minoritaire des électeurs, de 20 à 30 % environ, et n’obtient de majorité que par défaut, en deuxième choix, en quelque sorte. Et il faut attendre 5 ans, sans que parole soit rendue aux citoyens, même s’ils expriment bruyamment leur mécontentement, comme l’ont fait les gilets jaunes. Rien n’est prévu pour en tenir compte.

D’un autre côté, la pratique du référendum est une procédure lourde et nécessite une mise en place complexe. Il est nécessaire que la question posée soit pertinente et non biaisée, ce qui est plus difficile que l’on pourrait l’imaginer. Il me parait absurde d’y avoir recours pour trancher le début de débat sur la reconstruction de la flèche de Notre Dame. C’est typiquement le genre de décision qui demande de réunir des gens compétents, d’étudier la question de façon approfondie, et de confier le choix final à l’exécutif, à l’échelon le plus approprié et pas nécessairement celui du président de la République. Ce qui ne signifie pas que l’on ne doive jamais consulter les simples citoyens que nous sommes. Bien au contraire. Il ne faudrait pas, comme c’est trop souvent le cas de nos jours, que le représentant se considère comme plus qualifié que ses mandants et se permette des libertés avec ce pour quoi il a été élu. À de rares exceptions près, les élus ne représentent pas toute la population, bien qu’ils soient supposés tenir compte des souhaits des minorités. Contre-pouvoirs et garde-fous sont donc indispensables.