Oscar lave encore plus blanc

Le réalisateur noir américain Spike Lee et l’actrice Jada Pinkett Smith ont annoncé leur intention de boycotter la cérémonie des Oscars du 28 février prochain pour protester contre l’absence totale d’acteurs « de couleur » dans la sélection des « nominés » pour la deuxième année consécutive. « Il est plus facile pour un Noir de devenir Président des États-Unis qu’à la tête d’un studio » explique Spike Lee. Son combat pour les droits civiques s’inscrit dans la droite ligne d’un Martin Luther King dont l’anniversaire de naissance est fêté tous les ans vers le 15 janvier, le troisième lundi de janvier, c’est-à-dire hier pour 2016.

Dans l’industrie du cinéma, les acteurs de couleur ont été longtemps confinés dans des rôles ethniques de bons sauvages, ou de méchants absolus. Petit à petit, Sidney Poitier ou Nat King Cole ont été rejoints par des acteurs très populaires comme Will Smith ou Samuel L. Jackson qui ont tenu des rôles principaux au lieu de servir de faire-valoir. Dans les séries aussi la présence de minorités a été favorisée par le système américain de quotas, de même que dans la société en général. Cette méthode montre cependant ses limites lorsqu’il s’agit de faire des choix non contraints. Le poids des traditions et des préjugés pèse alors sur les sélections, ce qui donne ce résultat dénoncé par Spike Lee.

Nous aurions grand tort de critiquer nos cousins d’outre-Atlantique sans balayer d’abord devant notre porte. Le succès exceptionnel d’Omar Sy ne doit pas masquer la faible représentation d’acteurs « issus de la diversité » comme on le dit pudiquement. Et à part Reda Kateb, les acteurs d’origine maghrébine ne sont pas non plus légion. Il n’y a pas si longtemps, nous avons constaté qu’aucune dessinatrice de bande dessinée n’avait été sélectionnée pour participer au concours à Angoulême. Une absence remarquée, qui a amené quelques dessinateurs hommes à céder leur place, avec un certain panache, et le jury à revoir sa copie pour intégrer quelques représentantes de la gent féminine, qui ne manque pas de talents. Bien sûr, les femmes ne sont pas une minorité, et encore moins invisible, mais leur accès aux responsabilités est encore trop rare, et sur ce point les États-Unis vont probablement nous damer le pion en élisant la première présidente de leur histoire tandis que les hommes continueront à se disputer le pouvoir suprême en France.