Baisse de la hausse

Je ne sais pas si, comme moi, vous avez entendu récemment dans le journal télévisé du service public, l’annonce triomphale d’une baisse de l’inflation, dont nous aurions bénéficié ce mois-ci. J’emploie à dessein le conditionnel, car l’impression qui ressort quand je vais faire mes courses est tout à fait différente de ce résultat, dont on ne peut que se réjouir par ailleurs. Une satisfaction qu’il convient de modérer après un examen un peu plus attentif. Contrairement à ce que la formulation simplifiée de la situation pourrait laisser entendre, les prix à la consommation n’ont pas diminué par rapport à une période comparable. Ils ont continué à augmenter, mais moins vite.

Selon une terminologie désormais courante, nous aurions atteint un pic dans la courbe de progression des prix et ils commenceraient à diminuer légèrement. Les experts de la consommation n’hésitent d’ailleurs pas à prévenir le public que nous ne retrouverons probablement jamais le niveau de prix antérieur à la guerre en Ukraine et aux conséquences sur les matières premières. Malgré cette légère amélioration, les prix à la consommation auront augmenté de 4,5 % par rapport à juin 2022, ce qui reste une ponction non négligeable sur le pouvoir d’achat des Français. Cette moyenne cache une disparité essentielle. Si les prix de l’énergie se sont à peu près stabilisés à un niveau assez élevé, ceux de l’alimentation continuent à flamber, notamment les produits frais, pour atteindre 13,6 % sur un an. Les consommateurs en tirent intuitivement les conséquences. Leur panier reste sensiblement de même valeur pour les plus démunis, mais son contenu s’adapte vers les produits les moins chers. Les marques distributeurs prennent le pas sur les grandes marques, plus coûteuses.

Paradoxalement en apparence, le niveau d’épargne des Français n’a jamais été aussi haut. La crainte de manquer, de devoir piocher dans ses économies pour faire face au quotidien, explique probablement cette épargne « de précaution ». Les 50 % environ de Français qui peuvent partir en vacances vont, ou ont déjà, adapté leurs projets pour tenir compte de cette nouvelle donne. Ils partiront quand même, mais moins loin, moins longtemps et dans des formules plus économiques. Comme toujours, ce sont les plus précaires qui ont le plus à redouter de ces hausses de prix. Un exemple flagrant en est la situation de nombreux étudiants qui survivent grâce à des bourses, parfois, des petits boulots, souvent, contraints de sauter des repas faute de revenus suffisants et d’attendre le mois suivant pour manger à leur faim. Car la vie chère ne touche pas indifféremment les consommateurs. C’est un accélérateur puissant d’injustices sociales, mais est-ce bien une priorité de ce gouvernement  de les combattre?