Arrogance

S’il fallait choisir un qualificatif et un seul pour définir le président de la République actuel, ce serait celui-là. Oh ! bien sûr, sur la forme, Emmanuel Macron se garde bien en général de manifester des signes explicites de mépris, mais sur le fond, et sous couleur d’une franchise de bon aloi, il démontre constamment le sens d’une supériorité supposée sur ses interlocuteurs et la certitude inébranlable d’être dans le vrai. Les Français ont pu s’en rendre compte à de nombreuses reprises, notamment quand il affirmait pouvoir trouver du travail à un chômeur de longue durée, simplement en traversant la rue.

Si l’on transpose cette attitude au plan international, on se rend compte qu’Emmanuel Macron a des jugements tranchés sur les autres pays, et surtout qu’il ne peut pas s’empêcher d’en faire bénéficier la terre entière en laissant fuiter des propos qu’il n’aurait jamais dû tenir. Au point de susciter une crise diplomatique avec l’Algérie en dénonçant un « système politico-militaire fatigué », qui a immédiatement réagi à cette provocation en rappelant son ambassadeur après cette « ingérence inadmissible dans ses affaires intérieures ». Quoi qu’il pense, un président ne devrait pas dire ça. Macron aura beau protester de son amitié personnelle avec son homologue algérien, le président Tebboune, de telles critiques sont inacceptables pour un pouvoir qui s’est construit sur la guerre d’indépendance vis-à-vis de la puissance coloniale. Le gouvernement algérien laisse entendre que la rue, y compris les plus critiques envers lui, se retrouve unie pour rejeter une forme de néo-colonialisme de la part de la France. Le président Macron aurait donc fait une prophétie autoréalisatrice en affirmant que le pouvoir algérien instrumentalisait la colonisation pour se maintenir.

Toute l’attitude d’Emmanuel Macron, sa brutalité dans les échanges, sa fausse sincérité, suggère qu’il pense pouvoir se passer du maintien de bonnes relations avec des pays qu’il estime moins puissants ou moins influents. À une échelle moindre, il reproduit les rapports de force que la France subit de la part de soi-disant alliés tels que les USA, le Royaume uni ou l’Australie et il semble se venger du camouflet subi récemment de leur part dans l’affaire des sous-marins. La France joue le rôle de shérif adjoint en Afrique, grâce à la délégation de l’ONU, mais le maintien, même partiel, de l’opération Barkhane au Sahel repose sur une coopération avec les gouvernements locaux. La tentation est grande d’un retour aux beaux jours de l’Afrique-Occidentale Française et de l’Afrique-Équatoriale Française, le temps béni des colonies chanté par Michel Sardou, et officiellement disparu. L’empire colonial français a vécu. Son avatar de la Françafrique aussi, mais la décolonisation totale reste à faire. L’interventionnisme au Mali, au Niger ou au Burkina Faso rappelle un temps révolu, celui de la politique de la canonnière, qui a très mal fini à Diên Biên Phu.